De nombreux pharmaciens font actuellement l’objet d’une enquête menée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) pour avoir accepté, en violation de la loi anti-cadeaux, des avantages en nature de la part du laboratoire pharmaceutique URGO.
- Le dispositif anti-cadeaux
La loi anti-cadeaux vise à garantir l’impartialité et l’indépendance des professionnels de santé dans le cadre de leurs relations avec l’industrie.
Sous certaines conditions, elle interdit notamment :
- aux laboratoires pharmaceutiques « d’offrir ou de promettre des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte »[1] à toutes les professions de santé réglementées par le code de la santé publique comme les médecins, les chirurgiens-dentistes, les infirmiers ou encore les pharmaciens ;
- aux professionnels de santé visés de « recevoir des avantages en espèces ou en nature, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte »[2].
Ainsi, sauf exceptions prévues par les textes (ex : cadeaux de valeur négligeable, …), les pharmaciens ne peuvent accepter de la part d’un laboratoire pharmaceutique une somme d’argent ou des cadeaux.
- La condamnation du laboratoire URGO
En 2021, la DGCCRF a mené une enquête auprès du laboratoire URGO sur des pratiques susceptibles d’entrainer un manquement massif au dispositif anti-cadeaux.
Il en est ressorti qu’entre 2015 et 2021, le laboratoire URGO proposait aux pharmaciens de renoncer au bénéfice de leur remise contractuelle sur le prix d’achat de ses produits. En contrepartie, le laboratoire offrait aux pharmaciens des cadeaux de la même valeur que les remises prévues au contrat.
Cette pratique, caractérisant une violation du dispositif anti-cadeaux, a justifié la condamnation pénale du laboratoire URGO à payer une amende de près de 6,5 millions d’euros en janvier 2023.
- L’enquête actuelle menée auprès des pharmaciens
La DGCCRF s’oriente maintenant vers les pharmaciens qui auraient bénéficié desdits cadeaux pendant cette période.
Depuis plusieurs semaines, de nombreux pharmaciens ont déjà été convoqués et entendus par des inspecteurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes dans le cadre d’une audition pénale libre.
Pour rappel, le pharmacien qui reçoit des avantages de la part d’un laboratoire en violation du dispositif anti-cadeaux, engage sa responsabilité pénale : il encourt un an d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende[3]. Il est donc important pour le pharmacien de bien préparer son audition et d’être assisté d’un conseil.
Cette enquête et les auditions des pharmaciens devraient se poursuivre pendant plusieurs mois compte tenu de l’ampleur de ces pratiques : la DGCCRF a estimé qu’entre 2015 et 2021 les cadeaux offerts par le laboratoire URGO à ses clients pharmaciens s’élèveraient à près de 55 millions d’euros laissant supposer que de très nombreux pharmaciens pourraient être concernés.
[1] Article L1453-5 – Code de la santé publique