Une clinique est tenue de mettre à la disposition d’un médecin exerçant en son sein, les prestations pour lesquelles elle perçoit des financements des organismes de sécurité sociale (ex : salle d’opération, personnel minimum, …)[1]. Les prestations non couvertes par ces recettes (ex : local, équipements, matériel, facturation et encaissement des honoraires, …) peuvent être fournies par la clinique à la demande du médecin en contrepartie du paiement d’une redevance.
- Quelles conditions la redevance doit-elle respecter ?
La redevance, déterminée d’un commun accord entre les parties, est licite sous réserve de remplir certaines conditions et notamment :
- La clinique ne doit percevoir aucun financement par les caisses de sécurité sociale pour les services facturés au médecin. Une telle pratique reviendrait pour la clinique à facturer deux fois la même prestation. A titre d’exemple, ne peut entrer dans l’assiette d’une redevance facturée à un médecin psychiatre, le coût de la surveillance régulière de l’état de santé des patients couverte par les tarifs d’hospitalisation[2].
- La redevance doit correspondre, par sa nature et son coût, à un service rendu par la clinique au praticien. Cela signifie que la redevance versée par un médecin à une clinique ne saurait excéder la valeur du service rendu[3]. Relevons que les parties peuvent tout de même décider que la redevance versée par le médecin sera inférieure au coût réel[4] : cette pratique peut alors caractériser un acte anormal de gestion avec des conséquences fiscales[5].
A défaut de remplir ces deux conditions, le paiement d’une redevance par un médecin à un établissement de santé privé pourrait être considéré comme un partage prohibé d’honoraires prévu à l’article L. 4113-5 du code de la santé publique[6].
- Comment déterminer le montant de la redevance ?
Considérant que les prestations justifiant le paiement d’une redevance dépendent des conditions d’exercice de chaque médecin (spécialité, prestations convenues entre les parties, …), la redevance est, en pratique, fixée après négociation entre la clinique et le praticien.
Le contrat d’exercice libéral doit notamment fixer :
- L’assiette de calcul c’est-à-dire la liste des prestations fournies par la clinique : cela permet notamment de s’assurer qu’aucun financement n’est versé, en doublon, par les caisses de sécurité sociale.
- La base de calcul : le montant de la redevance peut être fixé soit par une méthode proportionnelle (facturation des prestations sur justificatifs des frais réels exposés), soit par une méthode forfaitaire (montant fixe ou pourcentage des honoraires facturés par le praticien).
Peu importe la méthode choisie, la redevance doit toujours être calculée sur la base de frais réels et justifiés.
- Dans quelle mesure une redevance peut-elle être modifiée ?
Quand bien même la redevance aurait été fixée d’un commun accord entre les parties, le médecin a, dans certaines situations, la possibilité de contester l’adéquation entre la redevance versée et les services rendus : dans cette situation, c’est à l’établissement de santé privé, et non au médecin, de prouver l’adéquation[7].
En cas de trop payé, la part de la redevance dépassant le coût des services rendus au médecin devient sans cause de telle sorte que le praticien peut demander au juge la diminution du montant de la redevance et la restitution de certains prélèvements indus[8].
Cependant, une clinique qui percevrait une redevance sous-évaluée, c’est-à-dire inférieure à la valeur des services rendus au praticien, ne peut réévaluer unilatéralement son montant afin de rentrer dans ses frais. De même, elle ne peut imposer au praticien le calcul de la redevance au coût réel alors que la méthode du pourcentage était contractuellement prévue[9]. Dans cette hypothèse, seule une renégociation (prévue ou non au contrat) entre les parties permettra de réévaluer le montant de la redevance.
Afin de diminuer le risque de contentieux entre les parties, il est vivement conseillé de signer un contrat d’exercice libéral et de prévoir une clause dédiée à la redevance. Cette clause doit prévoir a minima la nature des prestations assurées par la clinique, la méthode de calcul de la redevance, ses modalités de facturation et les conditions de sa révision.
[1] Articles R. 162-22 et suivants du code de la sécurité sociale
[2] Cass. Civ. 1ère, 22/01/2009, n°08-11.204
[3] Cass. Civ. 1ère, 28/04/2011, n°10-16.738
[4] Cass. Civ. 1ère, 20/05/2003, n°00-21.069
[5] CAA NANTES, 27/12/2006, n°04NT00165
[6] Cass. Civ. 1ère, 08/06/2004, n°01-16.802
[7] Cass. Civ. 1ère, 05/02/2020, n°19-12.473
[8] Cass. Civ. 1ère, 05/11/1996, n°94-18.335
[9] Cass. Civ. 1ère, 13/03/2007, n°06-10.229