A l’instar des autres professionnels de santé qui relèvent d’un ordre comme les pharmaciens, les infirmiers, les masseurs-kinésithérapeutes ou les pédicures-podologues, les professionnels médicaux (médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes) peuvent être visés par une plainte disciplinaire. Focus sur les principales caractéristiques de cette procédure.
- Qui peut déposer plainte ?
Plusieurs personnes ont qualité pour déposer une plainte disciplinaire. En pratique, il s’agit souvent d’un patient, d’un confrère ou encore du conseil de l’ordre dont dépend le professionnel de santé.
Relevons tout de même que le ministre chargé de la santé, le directeur général de l’Agence Régionale de Santé, le préfet, le procureur de la République, un syndicat ou encore une association de professionnels de santé ont également la possibilité d’initier ce type de procédure[1].
Conseil : la procédure disciplinaire a pour but de sanctionner d’éventuels manquements commis par les professionnels médicaux notamment eu égard aux règles déontologiques. Le plaignant ne peut donc pas solliciter le versement de dommages et intérêts dans le cadre de cette procédure (ex : demande de dommages et intérêts suite à une erreur de diagnostic, faute de soins, …)[2].
- Quelles sont les étapes d’une procédure disciplinaire ?
Dès l’enregistrement de la plainte au greffe du conseil départemental compétent, la procédure disciplinaire s’articule autour de différentes étapes.
- La tentative de conciliation
Le professionnel de santé doit être convoqué dans le délai d’un mois en vue d’une conciliation[3]. Lors de cette réunion, les parties sont ainsi réunies afin de tenter de mettre un terme au litige. Ainsi :
– Soit une conciliation totale est trouvée : la procédure s’arrête et aucune sanction ne pourra être prononcée à l’encontre du professionnel de santé sur les faits reprochés.
– Soit aucune conciliation n’est possible ou une conciliation partielle est trouvée : la plainte est transmise à la chambre disciplinaire de première instance : la procédure suit donc son cours.
Conseil : Il est important pour le professionnel de santé de se faire assister par un avocat dès la réception de la convocation afin de préparer la réunion de tentative de conciliation : en effet, cette réunion est la dernière possibilité pour le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme d’éviter une procédure disciplinaire et une éventuelle sanction.
- La chambre disciplinaire de première instance
Lorsque la chambre disciplinaire est saisie, le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme doit recevoir la copie de la plainte et des pièces afférentes. Le professionnel dispose alors d’un délai de quelques semaines pour faire valoir ses arguments à travers la rédaction d’un mémoire dont une copie sera adressée à la partie adverse.
Le plaignant aura alors à son tour la possibilité de répondre aux arguments soulevés par le professionnel visé par la plainte. Les parties ont ainsi la possibilité de répondre tour à tour aux arguments opposés par la partie adverse.
A noter que la chambre disciplinaire de première instance doit s’être prononcée dans un délai de six mois à compter de l’enregistrement de la plainte[4].
Les parties sont ainsi convoquées au moins quinze jours avant l’audience. Le jour de l’audience, elles sont invitées à faire valoir leurs observations oralement.
La décision est ensuite prise hors la présence des parties.
Conseil : la procédure disciplinaire est une procédure écrite : le professionnel doit communiquer ses arguments par la transmission d’un mémoire et de pièces justificatives dans les délais imposés par la chambre disciplinaire. Il ne peut donc pas faire valoir ses arguments le jour de l’audience pour la première fois.
- L’appel devant la chambre disciplinaire nationale
En fonction de la teneur de la décision rendue par la chambre disciplinaire de première instance, peuvent engager un recours à l’encontre de la décision : le plaignant, le professionnel sanctionné, le ministre chargé de la santé, le directeur général de l’agence régionale de santé, le procureur de la République et le conseil de l’ordre dont relève l’intéressé[5].
Ce recours doit être déposé ou adressé au greffe de la chambre disciplinaire nationale dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision[6].
Le professionnel de santé pourra faire valoir ses arguments par écrit de la même manière que devant la chambre disciplinaire de première instance.
Conseil : sauf exception, l’appel suspend la décision de première instance de telle sorte que si le professionnel a été sanctionné, il n’aura pas à exécuter la sanction disciplinaire tant que la chambre disciplinaire nationale ne se sera pas prononcée.
La décision de la chambre disciplinaire nationale peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification[7]. Ce recours doit être porté devant le Conseil d’Etat.
- Quelles sanctions peuvent être prononcées ?
Que ce soit devant la chambre disciplinaire de première instance ou devant la chambre disciplinaire nationale, l’objet de la procédure est la prononciation d’une sanction disciplinaire à l’égard du professionnel de santé visé par la plainte. Cette sanction peut être[8] :
– L’avertissement ;
– Le blâme ;
– L’interdiction d’exercer la profession (temporaire ou définitive, avec ou sans sursis) ;
– La radiation du tableau.
Conseil : la peine peut être exécutoire dès le lendemain du jour où elle devient définitive (expiration du délai de recours) : en fonction des faits qui lui sont reprochés, le professionnel de santé doit anticiper une éventuelle interdiction d’exercer la profession à bref délai.
Une procédure disciplinaire peut avoir des conséquences importantes sur l’exercice du professionnel de santé compte tenu des sanctions énumérées par les textes (ex : suspension d’exercer, radiation du tableau, …). Par ailleurs, la prononciation d’une sanction disciplinaire grave peut influencer le cours des autres procédures (ex : procédure civile, procédure pénale, …) quand bien même les textes prévoient qu’elles sont indépendantes les unes des autres. Il est donc conseillé au professionnel de santé de se faire accompagner par un avocat dès qu’il a connaissance du dépôt d’une plainte disciplinaire à son encontre.
[1] Article R. 4126-1 CSP
[2] Article L. 4126-5 CSP
[3] Article L. 4123-2 CSP
[4] Article L. 4124-1 CSP
[5] Article L. 4122-3 CSP
[6] Article R. 4126-44 CSP
[7] Article R. 4126-48 CSP
[8] Article L. 4124-6 CSP